Comment les taux d’intérêt vont-ils évoluer?
À la suite des dernières baisses de taux directeurs opérées par les banques centrales, de nombreux investisseurs et propriétaires immobiliers se demandent comment les taux d’intérêt vont bien pouvoir évoluer dans les mois à venir. Christoph Sax, économiste en chef chez VZ, analyse les attentes en matière de taux d’intérêt pour la Suisse, l’Europe et les États-Unis.

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La politique douanière de Donald Trump freine la croissance économique mondiale. En dehors des États-Unis, les attentes des acteurs du marché en matière de taux d’intérêt ont donc été revues à la baisse. Nombreux sont ceux qui prévoient désormais un assouplissement de la politique monétaire plus fort par rapport à quelques mois en arrière.
Suisse: les taux d’intérêt négatifs se rapprochent
C'est particulièrement vrai en ce qui concerne les prévisions portant sur la politique monétaire de la Banque nationale suisse (BNS). Sur le marché financier, les taux d’intérêt négatifs sont négociés à terme depuis un certain temps. Les obligations à court terme de la Confédération affichent également des rendements légèrement négatifs. Le marché s’attend à ce que la BNS abaisse le taux directeur à 0% dans un futur proche. Une nouvelle baisse à -0,25% est même anticipée pour l’automne. Cela s’explique ainsi: le franc s’est fortement renforcé par rapport au dollar – il a grimpé de 9% environ depuis le début de l’année. Dans ce contexte, le taux d’inflation est tombé à zéro en Suisse, notamment en raison d’importations moins chères.
Le retour des taux d’intérêt négatifs n’est toutefois pas certain. La BNS peut tout à fait tolérer une immersion temporaire du taux d’inflation en territoire négatif, tant que les perspectives d’inflation à long terme restent positives.
La banque centrale n’abaissera son taux directeur en dessous de 0% qu’en cas de changement fondamental des conditions-cadres, et que si le franc menace de se renforcer encore. Le dollar a toutefois regagné un peu de terrain récemment. Si le mouvement de détente observé dernièrement sur les marchés des devises se poursuit, la BNS pourrait renoncer aux taux d’intérêt négatifs.
La situation ne va pas changer pour l’instant, car les dépenses supplémentaires prévues pour l’armement et les infrastructures devraient soutenir la conjoncture et attiser l’inflation. Le niveau des taux d’intérêt demeure ainsi plus élevé qu’en Suisse, ce qui constitue un avantage pour la BNS, car l’euro reste intéressant comme monnaie de placement et ne se déprécie pas excessivement par rapport au franc suisse.
Zone euro: un nouvel assouplissement est probable
La Banque centrale européenne (BCE) a elle aussi réagi aux vents contraires de la conjoncture en continuant à abaisser progressivement son taux directeur. Ce dernier ne descendra toutefois pas jusqu’à 0%, car l’inflation reste légèrement supérieure à la valeur cible de la BCE dans la zone euro. Cette situation ne changera pas tout de suite dans la mesure où les dépenses supplémentaires à venir pour l’armement et les infrastructures devraient soutenir la conjoncture et avoir tendance à alimenter l’inflation. Le niveau des taux d’intérêt reste donc plus élevé qu’en Suisse – un avantage pour la BNS, puisque l’euro reste une monnaie de placement attrayante et ne se déprécie pas excessivement par rapport au franc.
Jeu d’équilibriste pour la Réserve fédérale américaine
Aux États-Unis, malgré les récents signes de détente dans le conflit commercial, l’inflation rebondira encore à court terme. En effet, les barrières douanières y restent plus élevées qu’avant l’entrée en fonction de Donald Trump. La poussée inflationniste devrait toutefois s’estomper dès l’année prochaine, car la croissance économique ralentit et les hausses de coûts peuvent moins bien être répercutées sur les clients finaux. La Réserve fédérale américaine (Fed) a récemment signalé qu’elle souhaitait attendre l’été afin de mieux évaluer l’impact des droits de douane. Mais à moyen et long terme, le taux directeur devrait aussi nettement baisser aux États-Unis – notamment parce que la Fed doit assurer non seulement la stabilité des prix, mais aussi le plein emploi. À partir de l’automne, la banque centrale américaine pourrait assouplir sa politique monétaire plus que prévu actuellement.

