Massy (awp/afp) - Agitée l'année dernière, calme et feutrée cette année: l'assemblée générale des actionnaires de Carrefour s'est déroulée sans encombre mercredi au siège mondial du groupe à Massy, où le PDG Alexandre Bompard a salué la "résilience" du groupe après une année 2024 non "sans épreuves".
Tout avait été fait mercredi pour ne pas voir se répéter les soubresauts de l'assemblée générale de 2024, fortement perturbée par les syndicats: policiers et gendarmes ont filtré les rues jouxtant le siège de l'entreprise, petits actionnaires et conseil d'administration installés dans deux salles différentes...
Pourtant, cette année, les sujets sensibles ne manquaient pas: conflit juridique sur ses magasins en franchise et en location-gérance, pression concurrentielle, campagnes de boycott et surveillance des marchés, tout a été évoqué ou presque mercredi: seule la question de l'avenir d'Alexandre Bompard, auquel il reste un an de mandat en tant que PDG, n'a pas été abordée.
Ce dernier a d'abord insisté sur l'acquisition des magasins Cora et Match et sur des "résultats très satisfaisants dans (les) pays coeurs, en France, en Espagne, au Brésil".
Puis la CFDT s'est lancée. "Communiquer par écrans interposés, c'est un peu malheureusement à l'image du dialogue social tel qu'on le vit chez Carrefour actuellement", a taclé, sous les applaudissements des autres syndicalistes, le délégué syndical Erwanig Le Roux.
Alexandre Bompard n'a pas échappé à une question sur la location-gérance: Carrefour est vivement critiqué, notamment par la CFDT, pour sa politique croissante de franchise et de location-gérance, une variante dans laquelle le distributeur reste propriétaire du fonds de commerce mais n'assume plus les coûts d'exploitation.
"Nous le répétons, l'utilisation de la franchise ou de la location-gérance devrait avoir pour objectif l'expansion de l'entreprise, pas le contournement de la législation sociale et la réduction des effectifs", a lancé le délégué CFDT au PDG du groupe.
Rémunération mollement approuvée
"Vous analysez Carrefour comme si nous étions dans un environnement protégé (...), comme si nous n'avions pas de concurrents, comme s'il n'y avait pas Shein, Temu", a déploré le dirigeant en retour, qui a profité de cette assemblée générale pour réitérer son souhait de persévérer dans le modèle de location-gérance.
La CFDT a assigné Carrefour en justice, estimant que ces passages nombreux de magasins en location-gérance s'apparentaient à un plan social déguisé. Mais Alexandre Bompard est convaincu que ce modèle permet de sauver des magasins: "Combien est-ce qu'on a fermé d'hypermarchés aujourd'hui ? Zéro", a affirmé le PDG, répétant que "dans le même temps, des hypermarchés avaient été fermés chez [leurs] concurrents, et [que] ça s'accélérait".
Le patron de Carrefour a aussi été interpellé au sujet d'une campagne de boycott dont le groupe fait l'objet, accusé par certains de soutenir Israël, dans le contexte de guerre avec le Hamas et de la crise humanitaire que celle-ci a provoquée dans la bande de Gaza.
Le dirigeant a martelé qu'il "n'y avait jamais eu et qu'il n'y aurait jamais de magasins Carrefour dans un territoire occupé", précisant que c'était "interdit" dans "les contrats de franchise" que pouvait signer Carrefour à l'étranger et fustigeant les "fake news" qui menaient selon lui aux campagnes de boycott.
Sujet polémique ces dernières années, la rémunération du PDG pour 2024, au menu mercredi, n'a été approuvée qu'avec quelque 61% des voix des actionnaires. L'année dernière, elle avait été adoptée à plus de 70%.
Au titre de l'exercice 2024, les actionnaires de Carrefour ont donné leur feu vert pour que le dirigeant touche quelque 3,4 millions d'euros, soit des revenus en baisse de plus d'un million d'euros par rapport à 2023.
Ils ont validé l'ensemble des résolutions sur lesquelles ils devaient se prononcer, la plupart très largement.
Invité à réagir à des informations du média La Lettre selon lesquelles le géant de la distribution néerlandais Ahold Delhaize avait entamé fin 2024 des discussions pour racheter Carrefour avant de jeter l'éponge en janvier, Alexandre Bompard a préféré ne pas commenter. Mais selon lui, cela montre "la grande attractivité" de l'entreprise.
afp/rp